Analyse de sol : un outil terre à terre ?

Une fois les récoltes passées, vient le temps de préparer les cultures suivantes. Pour cela, différentes étapes sont essentielles : la préparation du sol, la gestion de la fertilisation, le choix des variétés et ensuite nous pouvons repartir pour un cycle végétatif permettant de fournir des denrées végétales.

Aujourd’hui, nos pratiques ont évolué et ce, quelque soit la culture mise en terre. Nous utilisons différentes techniques, la charrue n’est plus forcément indispensable, la gestion de l’interculture devient importante, certains pratiquent la permaculture, d’autres du semis direct etc.

Le point commun de ces évolutions de nos pratiques : elles remettent toutes l’agronomie au cœur des productions et tiennent compte des sols comme socle essentiel pour le développement des plantes.

La réussite d’un changement de pratiques (travail du sol, mise en place de permaculture, changement de rotation) doit passer par une première étape fondamentale : l’analyse de sol.

Changer ses pratiques et faire évoluer son sol pour améliorer la fertilité globale d’une parcelle agricole est un vœu pieux ! Mais la cinétique des évolutions du sol reste très complexe et va grandement dépendre de l’état initial du sol de ma parcelle.

C’est pourquoi, une première étape réside à une étude de notre sol, pour cela nous avons accès à plusieurs outils dont le plus simple reste l’analyse de notre sol.

Bien évidement, cette analyse ne permet pas de tout comprendre quant au fonctionnement d’un sol (d’autres types de mesures et descriptions peuvent compléter cela : description de la flore, réalisation d’un profil de sol, mesures de l’activité biologique, etc.), mais c’est une première étape simple et sur laquelle on peut se baser pour le faire évoluer.

Avec une analyse, nous n’avons accès qu’à certaines données mesurables et exploitables, mais qui recouvrent les quatre grands axes du fonctionnement d’un sol : les parties physique, biologique, chimique et nutritive.

L’importance de l’échantillonnage

Avant de développer ces 4 axes, il reste un point essentiel de l’analyse de sol, et ce n’est pas au labo qu’on le retrouve… mais au champ, lors de la prise d’échantillons ! En effet, c’est la qualité de l’échantillonnage qui influera directement sur la pertinence de l’analyse de sol, car nous avons besoin de prélever 500 g de sol pour les analyses labo, alors que nous avons entre 3000 et 4000 tonnes de terre par hectare à représenter. La pertinence du prélèvement va dépendre des paramètres suivants :

Le respect de ces pratiques est fondamental pour s’assurer de la pertinence de cette mesure !

Le sol physique

Par sol physique on entend les constituants du sol qui permettent de caractériser (classifier le sol) grâce à une mesure granulométrique. Cette analyse mesure le pourcentage en éléments minéraux que sont les sables, limons et argiles. A cela on rajoute le pourcentage de matière organique du sol et éventuellement le pourcentage de calcaire total présent dans le sol (évidement, on n’en trouve que dans les sols sur roche calcaire, étonnant non !).

La somme de ces constituants

% argiles + % limons (fins et grossiers) + % sables (fins et grossiers) + Matière Organique + Calcaire total (éventuellement) = 100 % des constituants des sols.

C’est ce que l’on appelle la texture d’un sol : par exemple, un sol sablo-limoneux, argilo-calcaire.

Cela nous permet aussi d’estimer la quantité de terre fine où sont stockés les éléments nutritifs auxquels les plantes ont accès.

Avec ces différents paramètres, il est aussi possible d’estimer certains phénomènes physiques tels que la battance, la compaction et plus simple la réserve utile en eau (la capacité de stockage de l’eau par le sol).

Source : Supagro Source : Supagro

Le sol biologique

Par sol biologique on entend à la fois les constituants physiques du sol comme la matière organique (qui est inerte) et des constituants vivants du sol comme les insectes, les champignons et les micro-organismes qui ont un rôle prépondérant dans le fonctionnement d’un sol. Malheureusement, avec une analyse « classique », il est compliqué d’avoir des informations sur cette vie du sol.

On mesure tout d’abord le taux de matière organique du sol, la quantité de Carbone organique. Il arrive aussi que l’on mesure la quantité d’azote organique, ce qui nous permet d’avoir un ratio Carbone/Azote. Ce ratio donne une indication de l’état de la matière organique et de l’activité microbienne du sol.

FFVDT4
Un dernier indicateur peut être calculé, il reprend tous les paramètres ayant une influence sur le fonctionnement de la vie du sol et permet d’estimer l’activité de celle-ci. C’est ce que l’on appelle le coefficient de minéralisation (dégradation de la matière organique par la vie du sol).

Il existe bien d’autres analyses intéressantes sur la matière organique et la vie du sol, par exemple, quantifier la biomasse microbienne, connaître les différentes fractions de la matière organique, ainsi que les cinétiques de minéralisation du carbone et de l’azote d’un sol (résultat de l’activité des êtres vivants du sol). Mais toutes ces analyses sont plus complexes à interpréter et pas encore totalement démocratisées !

Le sol chimique

Il s’agit de mesurer le contexte chimique du sol dans lequel les racines des plantes et les micro-organismes vont se développer. C’est l’écosystème de notre sol.

La principale mesure est le pH du sol : pour cela on mesure la quantité d’ions Hydrogène dans l’eau contenue dans le sol. Ces ions positifs H+ ont pour effet d’acidifier nos sols. Cette valeur est essentielle car en fonction du pH d’un sol, les éléments nutritifs et la vie du sol vont fonctionner de manière très différente.

Si le pH est inférieur à 7, nous avons affaire à un sol acide, s’il est aux alentours de 7, il est neutre (comme la Suisse) et s’il est supérieur à 7, le sol devient basique ou alcalin.

Une autre mesure essentielle est la CEC (capacité d’échange Cationique) qui correspond à la quantité d’éléments chimiques que le sol peut stocker. Cette capacité de stockage dépend de la quantité d’argiles, limons fins et surtout de matière organique du sol. Cette entité composée d’éléments minéraux et organiques s’appelle le « complexe organo-minéral » et, chargé négativement, il va attirer les éléments nutritifs chargés positivement.

C’est d’une certaine manière le « garde-manger » du sol, qui stocke et libère pour la plante les éléments nutritifs.

rooting_and_soil_structure_389_zoom

Le sol nutritif

Une fois que l’on a bien caractérisé et identifié notre sol et son fonctionnement, il faut s’attarder sur les éléments nutritifs que les plantes vont prélever.

On retrouve les éléments dits majeurs (car ils représentent des importants besoins pour les plantes) :

Ces 4 éléments se retrouvent en quantité plus où moins importante dans les sols et ont pour origine la dégradation de la matière organique (qui contient ces éléments) mais aussi l’altération de la roche qui constitue le sol. Ainsi, sur une roche calcaire, nous trouverons beaucoup de calcium… étonnant non ?

Ces 4 éléments ont pour caractéristique d’être chargés positivement et de se stocker sur le complexe organo-minéral (si, je vous promets, on en a parlé !).

D’autres éléments tout aussi importants, l’azote et le soufre, sont chargés négativement. Ils ne se stockent pas dans les sols (on parle de lessivage car ils suivent l’eau qui s’infiltre dans nos sols) et ont donc une dynamique très différente. On utilisera une mesure différente qui se nomme le reliquat, c’est-à-dire la mesure de la quantité restant d’azote ou de soufre à un instant donné.

Enfin, il nous reste les oligo-éléments, qui – comme leur nom l’indique, sont présents en faible quantité dans les sols (bon, pas tout le temps en fait…) et correspondent à des besoins faibles des plantes, mais essentiels.

On retrouve les 6 éléments suivants :

Le suivi de ces oligo-éléments est tout aussi important car une carence peut avoir des incidences importantes sur la qualité et la quantité d’une récolte (par exemple les carences en molybdène sur les melons !)

Toutes ces mesures sont importantes, mais par la suite il faut les interpréter et savoir ajuster nos façons de travailler.

Pour cela des préconisations sont calculées, basées sur des normes issues des instituts techniques. Vos conseillers techniques des différents organismes qui vous accompagnent auront un rôle quant à l’interprétation de ces conseils et vos conditions de sol.

Enfin les préconisations !

Elles abordent majoritairement 3 axes :

Vous l’aurez compris, appréhender le fonctionnement d’un sol  n’est pas chose aisée. L’analyse de sol constitue un outil accessible et fiable, mais il existe bien d’autres outils, le premier étant l’observation de son sol et de son évolution en fonction de nos pratiques.

Aujourd’hui, de nombreuses méthodes remettent le sol au cœur de l’agronomie, que ce soit par la prise en compte de la vie du sol proposée par Claude et Lydie Bourguignon, les méthodes Herody sur la matière organique, l’étude d’un profil structural par Gautronneau.

Il faut commencer par des choses simples pour faire évoluer son sol et améliorer la fertilité globale d’une parcelle agricole… l’analyse de sol me paraît être une première étape comme faire un bilan sanguin régulièrement : je sais où j’en suis et je sais où je veux aller !

A vos claviers pour continuer à débattre sur cet outil, utile, parfois contesté mais fondamental quand on parle agronomie.

Kezak’OZ ? Participez au concours !

Je suis une outil, je prélève de la terre pour l’analyse,… je suis, je suis… ?

Cliquez ici pour participer !